Par le Docteur Rafii Arash
Les progrès de la génétique ont permis d’identifier des gènes dont la transmission dans une famille augmente le risque de développer un cancer du sein. L’identification des gènes BRCA1 et 2 dans les cancers du sein permet un dépistage poussé associé à des mesures préventives chirurgicales.
Du gène au cancer, rôle de l’hérédité
Chaque année, environ 40000 femmes sont diagnostiquées avec un cancer du sein en France. La majorité de ces cancers est sporadique sans cause retrouvée. Par contre dans 5 à 10 % des cas le cancer peut être du à la présence d’un gène muté au sein d ‘une famille. Un gène est constitué d ‘un fragment d’ADN contenu dans une cellule. Une mutation est une anomalie de la séquence du gène et résulte dans une dérégulation du fonctionnement cellulaire. Les cancers sont dus à l’accumulation de mutation dans plusieurs gènes provocant des anomalies majeures de la fonction cellulaire dont la multiplication n’est plus contrôlée par l’organisme.
Chez certaines familles il existe des anomalies génétiques qui lorsqu’elles sont transmises sont responsables de maladies génétiques (mucoviscidose…). Dans certains cas le gène muté est responsable de la survenue d’un cancer du sein et/ou de l’ovaire. Les deux gènes principaux sont BRCA1 et 2 (BReast Cancer). Ils jouent un rôle dans la réparation de l’ADN lors de la multiplication cellulaire. Ainsi si une mutation existe l’intégrité de l’ADN n’est pas assurée et l’accumulation de mutations peut conduire à la survenue d’un cancer. Dans le cas des cancers du sein cette transmission est dite autosomique dominante (un seul copie du gène anormal suffit pour provoquer la maladie). Le risque pour un parent atteint de transmettre la maladie est de 50 %. Les mutations de BRCA1 et 2 sont responsables de la survenue de cancer du sein et de l’ovaire.
Comment fait-on le diagnostique et que veut dire la présence d ‘une mutation
En France le diagnostique se fait par un oncogénéticien qui va d’abord s’intéresser à l’ensemble des cas de votre famille. Si ils suggèrent un risque (surenue de plusieurs cancers identiqus, âge jeunes…) il prescrira le plus souvent chez un sujet atteint le séquençage des gènes. Si aucune mutation n’est retrouvée le risque de développer un cancer du sein est très proche de celui de la population générale sauf dans des familles particulières et dans ce cas un suivi spécifique sera mis en place. Si une mutation est retrouvée, il est important de comprendre que ce n’est pas le cancer mais le risque d’avoir un cancer qui est transmis. Une patiente avec une mutation de BRCA1 ou 2 peut ne jamais développer de cancer.
Pour conseiller les patientes on parle du de développer un cancer tout au long de sa vie (60-80 % pour BRCA1 par exemple) et du risque relatif par an (3-5% par an pour une patiente donnée). Les cancers du sein surviennent à partir de 30-35 ans en fonction des familles et les cancers de l’ovaire surviennent rarement avant 45 ans. Cela a des implications sur l’âge de réalisation des chirurgies préventives.
Dépistage et prévention
Chez les patientes présentant une mutation, un dépistage spécifique associant des examens cliniques réguliers (tous les 6 mois) à une imagerie par résonance magnétique annuel (IRM du sein) est mis en place plus ou moins tôt en fonction de l’âge de survenue des cancers dans la famille (globalement on peut retenir 30 ans). Il est primordial pour les patientes de comprendre que la surveillance n’empêche pas la survenue du cancer, il permet de le diagnostiquer le plus tôt possible et ainsi augmenter les chances de guérison.
La chirurgie préventive s’est également développée ces dernières années. Elle consiste en deux aspects : La chirurgie préventive des cancers de l’ovaire (dont la mortalité est très élevée) consiste en l’ablation des ovaires et des trompes vers 45 ans. Réalisée par coelioscopie cette intervention présente souvent des suites simple. Elle diminue par ailleurs le risque de développer un cancer du sein. La mastectomie bilatérale réduit de 95-98% le risque de développer un cancer du sein. Cette intervention est associée à une reconstruction immédiate par prothèse ou par des tissus autologues. C’est une intervention lourde avec une réelle portée psychologique et doit être prudemment discuté avec le chirurgien.
Docteur Rafii Arash
Chirurgien gynécologue spécialisé en chirurgie cancérologique du sein et du pelvis, professeur à l’université Américaine Cornell. Il fait parti du comité de rédaction du Collège National de Gynécologie Obstétrique sur les maladies du sein et de la société européenne de Gynécologie oncologique sur la chirurgie des cancers de l’ovaire avancés.