Portrait par Thierry Piolatto
« Le pape français du peeling a hésité à faire dermatologie mais la passion de la peau l’a vite rattrapé. Il en a fait un art. »
Anti Age Magazine : le démarrage en médecine a été chaotique.
Dr Jean-Luc Vigneron : J’ai effectué mes études à Strasbourg dans une excellente classe de lycée. Au départ je voulais faire l’ENA mais mes parents connaissaient un garçon qui l’avait fait et qui était très ennuyeux donc j’ai laissé tomber. Apres je voulais faire de la pisciculture ou créer des parcs à thèmes, un concept nouveau à l’époque. Mais 18 élèves de ma classe m’ont dit : « Il faut faire médecine comme nous ! » donc j’ai fait médecine comme eux et cela a été le début d’un rêve. A la clé, d’excellents souvenirs, j’étais délégué de promotion, j’avais fondé la liste du dadaïsme philanthropique (ndlr : le dadaïsme remet en cause toutes les conventions et contraintes idéologiques, esthétiques et politiques; son fondateur Jean Arp est notamment né à Strasbourg) et j’étais devenu le grand spécialiste des dessins d’anatomie et j’ai d’ailleurs été 3 ans Moniteur d’Anatomie. J’ai ensuite fait une année de psychiatrie, mais si la théorie était séduisante, la pratique était vraiment peu gratifiante ! Alors, je me suis dit pourquoi pas gynécologue accoucheur, donner la vie, c’est beau, et ça c’est gratifiant. Malheureusement quand je me suis rendu compte qu’il fallait vraiment se lever la nuit, j’ai renoncé et je me suis orienté vers la Dermatologie, car c’était une terra incognita. Le Professeur Edouard Grosshans, véritable Pic de la Mirandole (symbole d’un savoir sans limites) de la dermatologie était passionnant.
Ce qui est caractéristique de la dermatologie ? Quand vous commencez cette spécialité, c’est une autre médecine; vous ne comprenez rien; le vocabulaire vous est inconnu.
AAM : les loisirs ont semblé orienté vos choix de vie ?
Dr J.-L.V : Comme je faisais beaucoup de voile et d’équitation, j’ai effectivement voulu me rapprocher de la mer et je me suis installé en Normandie. Dès mon 1er mois d’installation j’ai réalisé mon 1er peeling. J’avais déjà compris qu’il y avait quelque chose à chercher de ce côté. A l’époque (les années 80) il n’y avait même pas encore de fillers, j’ai donc beaucoup lu sur le sujet et cherché qui pratiquait en France. Il y avait bien le Dr Aron Brunetière et la pâte résorcinée de Unna, mais cela ne me semblait pas suffisant même si ses techniques apportaient de bons résultats de peeling moyen. Je me suis vite intéressé à l’acide trichloracétique (TCA). J’ai la faculté de pouvoir reproduire un geste en lisant un livre bien écrit. Si vous lisez au point de vous mettre dans la tête de l’auteur, c’est gagné ! J’ai donc avancé dans la technique TCA, aidé en cela par ce cher ami qu’est le Dr Jean Marc Trauchessec. Mais, vouloir agir profond avec le TCA n’est pas prudent et je me suis tourné vers le phénol. J’ai effectué des recherches sur le sujet et sur les conseils du Dr Pierre Fournier je suis allé voir le Dr Clyde Litton à Washington. Je n’y ai pas appris grand-chose ! J’ai élaboré ensuite mes 1ères formules et effectué mon 1er peeling au phénol sur une femme de Caen, qui elle-même, pendant plusieurs mois, me poussait à accroitre mes connaissances dans ce domaine. La formule n’étant pas encore très aboutie, j’ai alors rencontré le Dr Yoram Fintzi à Tel Aviv, connu de Christine Talayrach (devenue plus tard Christine
Vigneron). Ce médecin travaillait de façon un peu brutale étant anapath (son rôle est d’analyser les prélèvements biologiques), donc pas forcément doux, les patientes israéliennes n’ayant pas tendance à se plaindre… Avec ces nouvelles connaissances, j’ai retravaillé mes formules et cela a donné Exopeel, une technique de peeling profond au phénol. Plus tard, j’ai créé des formules de peeling moyens, superficiels etc.
AAM : L’esthétique médicale en toile de fond ?
Dr J.-L.V : Lorsque j’ai déménagé dans le sud de la France, j’ai souhaité me consacrer entièrement à la médecine esthétique. Il m’est arrivé d’être pendant 2 ans le second consommateur national de Botox (J’ai collectionné les flacons et j’en fais des œuvres, une d’entre elles contient 6 ans de flacons..). Je suis également devenu consultant de la société Dermaceutic. Je me rappelle qu’au moment où j’ai commencé à m’intéresser au peeling, c’était une procédure quasiment endormie surtout en Europe, même si une renaissance pointait avec les peelings superficiels glycoliques. C’est au moment où nous – Christine Talayrach et moi – ressuscitions les peelings en Europe que le Dr Zein Obagi poussait avec une énergie terrible le TCA aux USA à des concentrations excessives. Le travail a été et est toujours d’expliquer aux médecins les différents niveaux de peeling (3 en l’occurrence) et qu’à partir du 3ème on générait une exceptionnelle stimulation du derme avec un effet Reverse de 15 ans.
Anti Age : Les peelings profonds sont très impressionnants pour les patients !
Dr J.-L.V : Oui, on montre les photos avant / après et les photos du déroulement de la semaine. Il n’y a pas de mystère ! On voit tout de suite les patientes déterminées. Certains maris qui récupèrent leur épouse avec le pansement ou avec le masque de poudre me demandent « Etes-vous sûr que c’est la mienne ? ». Et même si avec l’évolution de la technique, il n’y a plus de douleur, il faut accepter d’être gonflée, d’avoir les yeux mi-clos pendant 24 heures. C’est 8 jours d’éviction mais qu’est-ce que 8 jours dans la vie d’une femme ? Et une nouvelle vie commence !
AAM : Lorsqu’un praticien veut faire des peelings, utilise-t-il vos formules ?
Dr J.-L.V : Oui, s’il ne veut pas bricoler sa formule, il achète la formule à la société Dermaceutic avec laquelle nous avons parcouru le long chemin du marquage CE, une procédure qui passe par un bureau spécialisé dans ce domaine mais qui demeure un parcours réglementaire et administratif très complexe. Avant de pouvoir effectué un peeling, nous leur imposons une formation car cette formule est une « bombe atomique ». Il y a une sélection des candidats selon leur niveau de pratique. Exopeel™ n’est pas qu’une solution que l’on applique, c’est UNE METHODE : préparation de la peau, l’acte complexe de l’application de la solution, des gestes indispensables le lendemain, le suivi de la semaine et des premiers mois.
AAM : Fait on un autre peeling 10 ans après par exemple ?
Dr J.-L.V : Tout d’abord, nos peelings s’adressent aux personnes qui ont des rides et celles qui ont en fait un n’ont plus jamais vraiment de rides… Je suis à nettement plus de 1000 Exopeel™ Full Face et j’ai eu environ 30 demandes de répéter l’acte. Il y a deux chose étranges : Quand elles demandent à recommencer, elles ont encore beaucoup moins de rides qu’avant et bizarrement c’est toujours demandé vers la 11ème année !!!
AAM : Publications et hobbies ?
Dr J.-L.V : Ma première publication scientifique importante a été en 1997 pour le magazine médical N°1 à l’époque « Le Concours médical » qui m’avait consacré 12 pages dans 3 numéros successifs. J’ai publié ensuite en Chine, au Japon, aux USA, en Allemagne. Côté loisir, en dehors de l’équitation dès 9 ans puis à un niveau de compétition pendant 15 ans, j’ai édité un auteur de bande dessinée érotique, Riverstone, le créateur de Nagarya (ndlr : ne cherchez pas sur google, les images sont floutées.)… Une de mes autres passions a été la photo. J’ai toujours fait de la photo (beaucoup de paysages urbains) et même donné des formations aux médecins pour l’argentique 24×36. J’ai exposé à la FNAC un reportage sur Prague après la chute du Mur. Je choisissais mes voyages avec pour but certains lieux propices aux photos et cela reste un objectif de mes voyages d’aujourd’hui. Enfin, en littérature, je suis fan des SAS, je les ai tous lus et j’ai très bien connu la femme de Gérard de Villers, la très belle Marie-Christine, qui se déplaçait avec lui sur des endroits incroyables et dangereux décrits dans ses livres (nos services de renseignement le débriefaient au retour !). J’ai une grande admiration pour les aventuriers, les pionniers, ceux qui comprennent avant les autres.
Ou le trouver ? Clinique VillaBianca 832 Bd Pierre Sauvaigo, 06480 La Colle-sur-Loup
Plus d’informations : villabianca.fr