Par le Docteur Nicolas Bachot
La demande de prise en charge des taches pigmentées est un motif fréquent. La prise en charge doit être avant tout médicale pour établir un diagnostic précis et éliminer les lésions cancéreuses (mélanome de Dubreuilh). Dans un second temps la prise en charge esthétique peut être envisagée. Les lentigos actiniques et le mélasma sont alors les diagnostics les plus fréquents.
La première étape va consister à faire le diagnostic précis de la ou les taches pigmentaires. Situation qui est loin d’être rare, plusieurs étiologies peuvent être associées. Les principales étiologies sont bien sur les lentigos actiniques pour les lésions isolées et les mélasmas pour les pigmentations plus diffuses.
LENTIGOS ACTINIQUES
Taches brunes en macules bien individualisées de teinte claire à foncé, appelés lentigos bénins, taches de vieillesse, taches solaires ou encore fleurs de cimetières. Elles sont caractéristiques de l’exposition solaire chronique répétée et concernent tous les types de peaux : on estime que plus de 90% des peaux blanches à l’âge de 50 ans ont au moins un lentigo.
Traitement :
Le laser Q switched reste la référence. Une séance sera généralement suffisante. Plus la tache sera pigmentée plus l’élimination sera aisée. L’inconvénient de ce laser est un risque d’inflammation et des croutes, difficilement camouflables pendant 10 à 15 jours.
Le laser KTP utilisé en vasculaire peut dépanner au prix d’une douleur supérieure au Q-switched.
La lumière pulsée (Intense Pulse Light, ou IPL) est le traitement alternatif. Souvent deux séances sont nécessaires pour une efficacité équivalente au Q-switched. L’avantage de cette technique va être le traitement concomitant des taches brunes et de la couperose. Les suites moins inflammatoires et plus facilement camouflables constituent également un argument de choix pour cette technique. L’IPL sera également à privilégier si les taches sont nombreuses et que les surfaces à traiter sont étendues.
La cryothérapie (azote liquide) reste un traitement très efficace mais présente plus de risque de cicatrices dépigmentées. Il est préférable de l’utiliser que sur un nombre limité de lésions. Son coût minime et sa disponibilité immédiate chez le dermatologue en font une technique encore très répandue.
Les peelings superficiels devront être très nombreux pour obtenir un bon résultat, des peelings moyens (TCA 30%) seront plus efficaces mais plus risqués (surtout sur peaux mates).
Les traitements cosmétiques. Si la nécessité de photo protection lors des expositions estivales est couramment admise, la nécessité de se protéger de l’exposition involontaire quotidienne doit encore être rappelée. Les cosmétiques dépigmentants en général ne sont pas suffisants pour faire disparaitre les lentigos actiniques. Par contre ils sont indispensables en prévention primaire et secondaire (après traitement laser).
LES 2 DIAGNOSTICS PIEGES DU LENTIGO BENIN
1- La kératose séborrhéique
Unique ou multiples elles se situent volontiers dans les zones séborrhéiques du visage, du décolleté et des mains comme les lentigos actiniques. L’épaisseur plus importante, l’existence de formes moins pigmentées aident au diagnostic.
La dermoscopie montre que c’est une lésion non mélanocytaire. La cryothérapie reste le traitement de référence pour les kératoses séborrhéiques.
2- Lentigo malin, ou mélanome de Dubreuilh
L’aspect clinique de cette lésion mal limitée se caractérise par des zones plus foncées, une surélévation et une légère infiltration. Quasi exclusivement sur le visage, c’est un diagnostic à évoquer lors de récidives multiples après cryothérapie ou laser. Bien souvent, seule l’histologie après biopsie ou exérèse permet d’affirmer ce diagnostic, la dermoscopie aide également. Le traitement repose sur la chirurgie, dans les formes très superficielles la cryothérapie et l’imiquimod peuvent être efficaces.
Chez les femmes principalement peuvent apparaître des lésions pigmentées sur le front, les joues, la lèvre supérieure. La pigmentation s’atténue, voire disparaît l’hiver, se renforce l’été et peut durer des années. Tous les types de peaux sont concernés.
Son traitement est long et laborieux. L’exposition involontaire aux UV de quelques minutes suffit à entretenir une pigmentation qui va rester plusieurs mois. Il est donc quasiment impossible de le faire disparaitre en été. Durant cette période une photo protection avec indice élevé (SPF50) est nécessaire associée à des cosmétiques dépigmentants (Crèmes de jour Day Protocole, DermEden).
Le trio de Klingman (Hydroquinone, Acide Rétinoïque, Dermocorticoïde) reste le traitement de référence mais utilisable que sur une durée de 3 mois. Les différents cosmétiques dépigmentants disponibles qui ont une efficacité globalement équivalente seront utilisés les 9 autres mois.
Les traitements par laser sont encore à l’heure actuelle décevants dans cette indication, et parfois inducteurs d’hyperpigmentation réactionnelle. Cependant une part vasculaire dans certains mélasmas peut être améliorée par l’IPL.
Il n’existe de traitement définitif du mélasma, il est donc conseillé de poursuivre la photo protection même après amélioration ou sa disparation, celui-ci pouvant récidiver l’été suivant.
Docteur Nicolas Bachot
Dermatologue libéral ancien chef de clinique des hôpitaux de Paris, spécialiste de l’anti-âge en exercice à Paris. Il est consultant pour l’industrie cosmétique depuis 15 ans et enseignant pour le Diplôme Interuniversitaire de Dermatologie Esthétique Française depuis 2005. Il est également le Directeur scientifique des Laboratoires DermEden.