Par le Naturopathe Karim Chubin
L’un des premiers pionniers de la recherche sur le stress a été le Docteur Hans Selye, un endocrinologue hongro-canadien. En 1936, Selye a réalisé une série d’expériences lors desquelles des rats ont été soumis au stress répétitif de faible intensité : basses températures, fatigue musculaire, adrénaline et morphine. Selon Selye, ces facteurs de stress (agents stressants) ont provoqué une réponse prévisible qu’il a appelé par la suite le Syndrome Général d’Adaptation générale (SGA).
Hans Selye a proposé ce concept du Syndrome Général d’Adaptation avec trois phases successives:
1) la réaction d’alarme où les symptômes apparaissent ;
2) la phase de résistance où l’on acquiert une résistance non spécifique qui est suivie de la disparition des symptômes ;
3) la phase d’épuisement : les mêmes symptômes réapparaissent, menant finalement à la mort.
Selye a également inventé le terme «stress systémique» pour souligner que SGA renvoie aux facteurs de stress qui influent sur le corps ainsi que sur l’esprit, que ce soit directement ou indirectement.
La capacité de notre organisme à modérer le stress de manière à maintenir l’homéostasie contribue fortement au bien-être physiologique. Elle permet également de ralentir le processus de vieillissement tout en assurant la prévention des maladies chroniques. L’homéostasie, un terme forgé par Walter Cannon en 1926, désigne un état stationnaire (d’équilibre) de l’organisme ainsi que la multitude des mécanismes physiologiques qui coordonnent sa régulation. Walter Canon qui a présidé le département de Physiologie de Harvard était l’une des personnalités les plus respectées dans le monde scientifique du 20ème siècle. Il a été pionnier de la première heure et une figure d’autorité en matière de la médecine psychosomatique.
Walter Canon qui a présidé le département de Physiologie de Harvard était l’une des personnalités les plus respectées dans le monde scientifique du 20ème siècle. Il a été pionnier de la première heure et une figure d’autorité en matière de la médecine psychosomatique. Walter Cannon a été le premier scientifique à reconnaître que les facteurs de stress pouvaient être émotionnels et pas seulement physiques.
Le système de réaction du corps au stress stimule la libération des hormones, en particulier l’adrénaline et le cortisol. Les réactions au stress aigu favorisent l’adaptation et la survie alors que le stress chronique affaiblit l’organisme le rendant plus sensible aux maladies infectieuses ainsi qu’aux maladies dégénératives chroniques y compris l’obésité, le diabète, l’ostéoporose, l’hypertension, les maladies cardiovasculaire et le cancer. Une exposition excessive aux hormones du stress contribue à son tour au stress oxydatif à travers l’activation fréquente et durable de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS). Le stress oxydatif qui entraîne des lésions mitochondriales est une cause importante, souvent ignorée, de maladies et du vieillissement.
Equilibre de l’axe HHS
Les interactions complexes entre l’hypothalamus, l’hypophyse et les glandes surrénales coordonnent le système hormonal. Lorsque le système limbique perçoit le stress, l’hypothalamus libère l’hormone appelée corticotropine (CRH) qui est le principal régulateur de l’axe HHS.
Ensuite la corticotropine (CRH) envoie le signal à l’hypophyse de libérer une hormone appelée adrénocorticotropine (ACTH). Après, l’ACTH se dirige dans le cortex surrénalien en stimulant la glande surrénale pour qu’elle puisse synthétiser et secréter des glucocorticoïdes, principalement du cortisol. Enfin, l’augmentation du taux de cortisol inhibe la libération de CRH et d’ACTH. Ce mécanisme à rétroaction négative du système endocrinien permet à l’axe HHS de maintenir l’homéostasie après une activation aiguë. Cependant, une activation fréquente et prolongée de l’axe HHS contribue à l’apparition de diverses pathologies.
Adaptogènes : modulateurs de stress naturels
L’origine du terme « adaptogène » remonte à 1947 et elle est attribuée à un scientifique russe Nikolai Lazarev qui le définit comme une substance capable d’induire dans un organisme un état de résistance augmentée non spécifique au stress en diminuant l’intensité de la réaction d’alarme (phase 1 de SGA). Au cours des années 50 et 60, Lazarev et son protégé, le docteur Israel Brekhman, ont lancé une étude sur les plantes adaptogènes. Travaillant à l’Académie russe des sciences dans la région de l’Extrême-Orient de la Russie soviétique, Primorye, Lazarev et Brekhman ont dirigé une équipe de plus de 1000 chercheurs. Ils ont analysé des milliers de plantes de Sibérie, dont douze placées
Leurs recherches les plus intéressantes ont porté sur Eleutherococcus senticosus, également connu sous le nom de ginseng sibérien. Il ne faut pas confondre l’Eleutherococcus avec Panax ginseng, car ils se distinguent considérablement tant sur leur composition chimique que sur leur composition pharmacologique. Bien que Eleutherococcus et Panax soient des espèces différentes, leur interchangeabilité apparente accentue les propriétés uniques des plantes sauvages de Sibérie. Brekhman a émis l’hypothèse que les plantes sibériennes qui se sont adaptées à des conditions climatiques extrêmes, ont développé une vitalité et une puissance exceptionnelles, qualités qu’elles peuvent transmettre à l’homme.
L’un des attributs caractéristiques des adaptogènes est leur capacité à intervenir comme des «vaccins contre le stress», c’est-à-dire les adaptogènes peuvent provoquer un effet de vaccin, protégeant ainsi l’organisme contre le stress à venir. Puisque l’effet protecteur des adaptogènes n’est pas indéfini, cela nécessite une exposition continue aux adaptogènes. Le Docteur Alexandre Panossian, un leader dans la recherche contemporaine sur les adaptogènes, compare les effets protecteurs des adaptogènes à l’exercice physique. L’exercice physique, explique-t-il, améliore l’endurance et la performance physique, mais ne «vaccine» pas contre la dégénérescence physique future. En d’autres termes, rester en forme nécessite l’observance d’un régime sportif. De même, maintenir une «relation» durable avec des plantes adaptogènes contribue à une gestion efficace du stress.
Définition des plantes adaptogènes et preuve de leur efficacité
Pour qu’une plante ou une substance soit classée comme un adaptogène, elle doit satisfaire les conditions suivantes:
· Présenter des propriétés protectrices contre le stress (réduction des lésions dues au stress)
· Présenter des propriétés stimulantes telles que l’amélioration des performances intellectuelles ou physiques (sans les effets secondaires associés aux stimulants du système nerveux central conventionnels)
· Présenter la capacité de réparer ou de maintenir l’homéostasie
· Présenter un effet de normalisation non-spécifique (ses actions doivent être générales et ne pas concerner un organe donné, au contraire les adaptogènes doivent développer la capacité de l’organisme à s’adapter au stress)
Cette substance doit être inoffensive et provoquer aucun dommage ni d’effets secondaires, même si les adaptogènes sont administrés régulièrement sur de longues périodes
Quant aux études contrôlées, le test de l’efficacité des adaptogènes et des adaptogènes potentiels sous-entend en règle générale des expériences élaborées et menées minutieusement qui vérifient la fonction cognitive ou l’endurance physique du corps après ou au cours d’une exposition au stress. Par exemple, dans une étude menée en 2009 les scientifiques ont testé les effets du Rhodiola rosea sur des rats en état de fatigue après avoir nagé. Ils ont trouvé que la plante Rhodiola augmentait significativement le temps d’épuisement, d’une manière dose-dépendante, tout en diminuant les biomarqueurs de fatigue, tels que l’azote uréique sanguin, la transaminase glutamique oxalo-acétique sérique et la transaminase glutamique-pyruvique sérique. De plus, la Rhodiola a augmenté significativement l’expression de la protéine Hsp70 (protéine de stress 70), un puissant marqueur de prévention de maladie et de ralentissement de l’âge.
Les protéines de stress sont des cellules spécialisées produites en réponse à un stress; elles assurent une fonction de protection et en même temps elles préviennent les dommages létaux. Il a été démontré, par exemple, que la réaction au stress protégeait les cellules contre les effets toxiques de l’alcool, des métaux lourds, des xénobiotiques et des oxydants. Hsp70 est une protéine de stress qui contribue à l’homéostasie en contrôlant la qualité des protéines dans des conditions normales et en situation de stress. L’expression efficace de Hsp70 (et l’activité relative à l’HSF1) est associée à une santé dynamique, alors que l’expression inhibée du Hsp70 est un marqueur majeur des maladies liées au vieillissement et au vieillissement. Les adaptogènes sibériens, comme présenté ci-dessous, décèlent une capacité remarquable d’augmenter l’activité du Hsp70, c’est pourquoi ils constituent une contribution importante à la médecine anti-vieillissement.
Adaptogènes sibériens : les 5 joyaux de la naturopathie
L’aperçu ci-dessous résume brièvement les vertus de ces 5 remarquables plantes utilisées en naturopathie. Etant donné que chaque plante possède des propriétés uniques, les adaptogènes sont généralement administrés sous forme de combinaisons rigoureusement choisies parmi différentes plantes. C’est parce que les adaptogènes contiennent des dizaines ou des centaines de substances phytochimiques qui interagissent entre elles tout en déclenchant des avantages synergiques. Par exemple, les scientifiques ont identifié 140 composants actifs dans la Rhodiola Rosea, 100 composants dans l’Eleutherococcus senticosus, et 200 dans le Schisandra chinensis.
Rhodiola Rosea est un adaptogène bien connu avec un grand nombre de propriétés, y compris la protection mitochondriale et son action antioxydante. Cette plante stimule aussi la production d’adénosine triphosphate (ATP) tout en augmentant la synthèse protéique des muscles et l’activité anabolique. Par ailleurs, il a été prouvé que la Rhodiola augmente la protéine Hsp70 dans des cultures de cellules humaines mononucléaires, dans les tissus des rats Wistar et dans les fibres musculaires squelettiques murines.
Rhaponticum carthamoides est une plante vivace qui pousse dans des régions montagneuses subalpines dans l’ouest et l’est de la Sibérie ainsi qu’en Asie Centrale. Rhaponticum présente une forte activité anti-microbienne, anti-inflammatoire et antioxydante. Il stimule de manière importante la protéine Hsp70. Récemment on a prouvé son efficacité en terme de protection, de réparation et de stimulation de l’ADN.
Schisandra chinensis est l’un des adaptogènes les plus étudiés. Il présente de puissantes propriétés dans la protection du foie, des propriétés neuroprotectrices, une activité antioxydante. En plus, il possède un potentiel anti-vieillissement en agissant sur les niveaux de glutathion mitochondrial et en atténuant les altérations mitochondriales liées au vieillissement. Les puissants effets protecteur du Schisandra sont largement liés à sa capacité de stimuler l’activité de la protéine Hsp70. Par exemple, chez une souris atteinte d’une lésion hépatique induite par l’acetaminophène les scientifiques ont constaté que le Schisandra provoquait une cytoprotection hépatique en stimulant une activité de la protéine Hsp70.
Eleutherococcus senticosus cette plante est reconnue comme la reine des adaptogènes. Un examen de 35 essais cliniques comprenant plus de 6000 sujets humains en pleine santé a démontré que Eleutherococcus améliore l’endurance physique et les capacités mentales dans des situations de stress. Par ailleurs, ce même examen a évalué les effets d’Eleutherococcus sur 2 200 patients atteints d’hypertension, de diabète ou d’athérosclérose. Dans la plupart des cas, Eleutherococcus a apporté des améliorations modérées par rapport à l’état initial des patients. Il a été prouvé que cette plante protège également les neurones du cerveau. Les chercheurs actuels menant des recherches sur ses effets bénéfiques concernant les maladies neurodégénératives, y compris la maladie de Parkinson, se montrent optimistes à ce sujet.
La Berberine est un alcaloïde isoquinoline dérivé de diverses plantes, y compris la Berberis arista. Les plantes contenant de la Berberine ont été utilisés pendant plus de mille ans en Chine pour traiter les infections intestinales, et plus spécialement les diarrhées bactériennes. La Berberine exerce une activité anti-microbienne en inhibant la protéine FtsZ, une protéine de division cellulaire. La Berbérine présente également des propriétés anti-inflammatoires principalement par l’inhibition de l’expression des cytokines inflammatoires. Les propriétés pharmacologiques les plus importantes de la Berberine comprennent des effets bénéfiques sur la gestion de l’insuline et de la glycémie. Par exemple, il a été prouvé que la Berberine est tout aussi efficace que le médicament metformine utilisé pour réduire la glycémie à jeun, la glycémie postprandiale, l’insuline à jeun, le LDL-C et les triglycérides. Bien que la Berberine ne soit pas un adaptogène classique, elle partage des propriétés similaires. La Berberine module le stress en influençant le microbiome intestinal.
Dans une étude de 2017, les scientifiques ont soumis les rats à un stress chronique, induisant ainsi des symptômes de dépression et une diminution du poids corporel. Cependant, en cas d’exposition à la Berberine, les dommages physiques et mentaux induits par le stress ont été inversés.
Le stress chronique, y compris le stress physique, mental et émotionnel, est un important facteur de causalité du vieillissement et de la maladie. Le stress chronique mène à l’hyperactivation de l’axe HHS, entraînant un excès de cortisol, des dommages oxydatifs, des dommages mitochondriaux et une diminution de l’activité de la protéine Hsp70. Les plantes adaptogènes, et plus particulièrement les combinaisons de celles-ci, régulent l’axe HHS tout en augmentant l’activité de la protéine Hsp70. Lorsqu’elles font partie d’un programme de bien-être global, comprenant une alimentation correcte et des exercices appropriés, les plantes adaptogènes sibériennes peuvent contribuer considérablement à la médecine anti-âge.
Naturopathe Karim Chubin
Karim Chubin est un naturopathe certifié et un praticien-nutritionniste spécialisé en homéostasie du corps et de l’esprit. Il porte une attention particulière au stress émotionnel et à ses conséquences physiologiques. Depuis ses bureaux à Génève et à Paris, Monsieur Chubin soigne ses patients en utilisant une approche unique et holistique composée de tests de diagnostic avancé et de traitements personnalisés intégrant la phytothérapie, la médecine nutritionnelle et la diététique.